MARIE DE SOLEMNE

MARIE DE SOLEMNE

mardi 14 juillet 2015

L'ABANDON

Voilà que le vent claque et que la peur revient.
Je sens qu'un évènement va survenir.
Je ne sais pas quand. Je sais seulement.
Je ne réfléchis pas, je ressens.
C'est beaucoup plus puissant.
Encore ce vent sauvage qui tord les arbres et fait claquer les portes.
Mon coeur s'inquiète.
J'entends des pas rapides dans l'escalier,
J'essaie de voir ce qu'il se passe,
Mais personne ne fait attention à moi.
Puis je perçois la vibration d'un rire,
C'est Paul, mon papa. Moi je m'appelle Charles.
Je traverse le couloir pour le voir. Il est déjà remonté au premier.
Dans l'entrée je bute sur des valises.

Voilà que le vent siffle et que la peur s'installe,
Sourde et mauvaise.

Soudain, ma famille se retrouve devant la grande porte de la maison qui s'ouvre.
Je tourne autour de ceux que j'aime, j'aimerais parler aussi, mais je ne peux pas.
Toutes les valises sont chargées dans la voiture.
Je suis le premier à coté de la portière qui s'ouvre.
Dès que je peux,  je m'engouffre et m'assied sagement.
Je regarde par la fenêtre. Je suis petit, ll faut que je tende le cou pour voir la route.
Nous traversons une forêt. J'ai chaud, je suis bien, et pourtant, je sens que quelque chose ne va pas.

Puis la voiture s'arrête dans un chemin herbeux.
Je suis heureux. Je crois que nous sommes arrivés. 

Je saute d'une porte à l'autre,
Mais mon papa Paul s'énerve après moi.
Je ne comprends pas.
J'essaie d'être très sage.
Pourtant il me prend sous le bras et entre dans la forêt.
Et là…
Là, je sens mon coeur s'affoler, je me débats, je gémis.
Rien n'y fait.

L'homme attache la lourde chaîne à mon collier puis au tronc rugueux d'un grand arbre.
Voilà que le vent hurle et que la terreur me prend.

Mon papa, ma famille, la voiture…
Ils sont tous partis.
Me laissant enchaîné comme un fauve dans cette sombre forêt.
Pourtant je suis petit, un tout petit teckel à poil long et roux.
Pourtant j'ai toujours été sage…
Mais sans doute pas assez encore pour ces humains qui ne savent pas comment aimer.
Je me suis couché en boule au pied de l'arbre, et j'ai gémi, hurlé à la mort, tiré sur la chaîne.
Mais je suis trop petit et le vent est trop fort.
Alors j'ai fermé les yeux et très longtemps après,
Je me suis endormi dans les bras d'une belle lumière dorée venue me libérer, me guider. 

Maintenant, moi je suis libre.
Mais ma famille est prisonnière,
Enchaînée à jamais à ce jour de vacances qui a mal commencé.

Si je reviens, j'essaierai de mieux encore leur apprendre à aimer.
C'est long pour un humain de comprendre qu'abandonner un être, c'est ne l'avoir jamais aimé.
Je patienterai.

Charles. émoticône heart
                                                                                                    © Marie de Solemne

1 commentaire:

  1. C'est horrible....
    Les chiens sont tellement aimants.
    Tellement....
    Amour...

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