MARIE DE SOLEMNE

MARIE DE SOLEMNE

lundi 17 août 2009

CHERCHE SIÈCLE BIEN ASSURÉ POUR PARANO SUR-ENTRAÎNÉ

Il est assez fréquent d’entendre dire que les Occidentaux sont des assistés… Et, évidemment, ce n’est pas tout à fait un compliment.

Bien sûr, nous nous rebellons tous contre un tel qualificatif peu glorieux, en brandissant avec orgueil notre sacro-sainte individualité, autonomie, etc.

Seulement voilà, si nous remplaçons benoîtement le mot assisté par le mot assuré, que découvrons-nous ?

C’EST VRAI ! MONSTRUEUSEMENT VRAI !

Assistés, assurés : même combat !

Certes, nous pouvons toujours nous enferrer un peu plus et refuser avec morgue la définition de « peuple d’assistés », mais, quelle que soit notre mauvaise foi, il nous est impossible de nier l’évidence : nous sommes réellement un « peuple d’assurés » !

Par les cornes de la limace ! (Eh ! Pourquoi pas la limace ?)

Que nous est-il donc arrivé à nous, hommes et femmes du pays-du-soleil-couchant (en clair, pour ceux qui manquent de repères géographiques : l’Européen, le Français) pour avoir à ce point besoin de s’assurer ?

C’est que, justement, l’individualisme coûte cher ! N’avez-vous jamais entendu parler de son éminence grise, affreusement redoutée et fuit comme la peste : la responsabilité individuelle ?

Ah ! Je vois que nous commençons à mieux estimer l’étendue de l’horreur… et de l’erreur. La réalité est que nous manquons tellement d’assurance personnelle que nous exigeons d’être assurés afin de nous rassurer… (simple, non ?) Le problème est que nous sommes voraces (et trouillards…) nous nous assurons pour tout ! Absolument tout.

C’est inouï !

De nos jours, aucune action, aucun pas en avant, aucune décision ne peuvent plus être pris sans, auparavant, s’être assuré ! On assure tout et n’importe quoi ! Bien sûr la maison, la voiture, les bijoux, les tableaux, mais aussi le chien, les poissons rouges, le salon de jardin et bien évidemment soi-même ! Assurer sa vie, c’est quand même le minimum pour un parano, non ! Certains en assurent même quelques petits morceaux en plus (on ne sait jamais…!) : une main, les yeux (ou un seul, ça dépend), la voix, les jambes, et j’en passe.

Aujourd’hui, l’intolérable est de perdre la moindre chose sans recevoir en contrepartie un dédommagement ; dédommagement financier bien sûr !

Eh, oui, tout se compte, tout se comptabilise, même un doigt de pied, et le pire est que donner une valeur marchande à un bout de doigt signifie le valoriser !

Subtile perversité de l’être humain moderne…

Le drame (car évidemment drame il y a, sinon ce ne serait pas intéressant, n’est-ce pas ?) c’est que l’on ne s’engage plus dans quoi que soit sans avoir, auparavant, contracter une assurance. Avant on contractait le typhus ou la peste bubonique, maintenant on contracte une assurance ! Remarquez, c’est à peu près la même chose : c’est terriblement contagieux et ça finit toujours par vous bouffer la vie.

Bon, que les plus courageux d’entre nous ne se désespèrent pas si vite, il reste tout de même un secteur où ces garces d’assurances se casse les dents : l’amour !

Ah… Ce n’est pas faute d’avoir, là aussi, des clients ! Même en amour, les gens veulent des garanties tous risques, tout déplacements ! Seulement voilà, l’amour est rebelle à toute assurance maladive, impossible à enfermer dans un contrat, même avenant !

Vous avez compris, maintenant, pourquoi l’amour est si rare : nous n’osons plus être amoureux, personne ne veut nous assurer ! Personne ne peut garantir que ça durera toujours, que nous ne souffrirons jamais et, qu’en cas d’échec, nous serons intégralement remboursés (quoi que…) à la valeur du neuf. C’est un comble tout de même !!

Bon, il est donc clair qu’aucune compagnie n’est encore prête à assurer nos amours, alors PROFITONS-EN !

Il est inutile d’aller se retourner l’estomac (et le reste d’ailleurs…) en s’offrant un saut à l’élastique pour ressentir l’exaltation du saut dans le vide. Pour cela il suffit d’oser tomber amoureux : d’aimer sans assurance ! Le must, en matière de risque, le sublime à la portée de tous.

Tant pis pour les tièdes, les mièvres, les comptables angoissés, les financiers parano. Qu’ils continuent d’assurer leurs fantasmes. Aimer est réservé aux audacieux, aux intrépides, aux indépendants responsables.

L’amour ne sera jamais assuré, car ce qui nous séduit en lui, est la part d’incertitude qui nourrit le frémissement amoureux

Marie de Solemne

© Éd. Dervy

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